beaucoup d'efforts pour quels rsultats ?

September 2024 · 6 minute read

L'apprentissage repart-il à la hausse ? Il faudra sans doute attendre quelques mois pour s'en assurer, mais les dernières estimations du gouvernement marquent un rebond après des mois de chute libre en raison de la crise. Les contrats d'apprentissage ont enregistré une forte progression en août 2009 avec 13.015 entrées contre 7.533 au mois de juillet. En juillet 2009, les volumes d'entrées constatés avaient diminué de 35,8% par rapport à juillet 2008, selon les chiffres de la Dares (ministère du Travail). Etat, organisations professionnelles et régions cherchent à relancer ce mode de formation qui donne de bons résultats : dans 70% des cas, les contrats d'apprentissage débouchent en effet sur un contrat à durée indéterminée. Le gouvernement s'est fixé un objectif de 320.000 jeunes apprentis entre le 1er juin 2009 et le 1er juin 2010. Il a récemment décidé de mettre en oeuvre un plan de relance de l'apprentissage d'ici décembre 2009. Des ateliers sur l'apprentissage seront ainsi organisés, réunissant des apprentis, des entreprises, des centres de formation, au niveau régional et national. Objectif : réfléchir aux moyens de mieux orienter les jeunes vers l'apprentissage, trouver plus facilement des entreprises d'accueil pour eux, développer cette formule dans tous les cursus et dans la fonction publique. Un portail internet devrait aussi être prochainement mis en ligne pour mettre en relation les jeunes et les entreprises. Le Medef, comme d'autres organisations professionnelles, tentent aussi de faire la promotion de cette forme d'apprentissage à coup de campagnes de communication. De beaux projets mais qui, selon les régions, ne permettront pas forcément de changer la donne. "Qu'une organisation professionnelle comme le Medef ou la CGPME (Confédération générale des petites et moyennes entreprises) fasse une communication sur l'apprentissage, pourquoi pas, mais la cible devrait être plutôt les entreprises que les jeunes, car les jeunes on les a, il n'y a pas de pénurie de jeunes mais d'entreprises", estime Laurent Lacour, directeur du service de la formation professionnelle et de l'apprentissage à la région Limousin et responsable de l'apprentissage à l'Association des régions de France (ARF).

La réforme du bac professionnel en question

La question des apprentis sans employeur a surgi au moment des débats sur le projet de loi sur la formation professionnelle, il y a quelques semaines. Le chiffre de 100.000 personnes avait alors été avancé. La crise économique, qui a conduit les entreprises à réduire la voilure, explique pour une large part ce phénomène. "Par temps de crise, les entreprises tentent de sucrer à la marge avant de licencier, les contrats d'apprentissage en pâtissent, surtout dans le tissu des PME qui font beaucoup d'apprentissage habituellement", explique-t-on au Conseil national des missions locales (CNML). Les missions locales ont d'ailleurs du mal à faire signer des contrats de ce type. "Les jeunes qui sont en échec scolaire n'ont pas le niveau pour entrer en contrat d'apprentissage, ça pose le problème des formations qu'on peut leur proposer pour se remettre à niveau", poursuit la même source. La réforme de la filière professionnelle n'a pas arrangé la situation, d'après les régions, et constituerait même un frein à l'apprentissage. "Les entreprises n'ont pas forcément envie de recruter pour trois ans un jeune qui sort de troisième et qui n'a aucune expérience professionnelle, explique Laurent Lacour, auparavant ces jeunes sortaient d'un BEP à 16-18 ans avec deux ans d'expérience professionnelle." Depuis la rentrée 2009, le bac professionnel a été ramené de quatre à trois ans. Les jeunes qui souhaitent préparer un bac professionnel doivent le faire à partir d'un contrat d'apprentissage d'une durée obligatoire de trois ans. "Trois ans, c'est trop long pour une entreprise", assure Michel Morin, vice-président chargé de la formation initiale, professionnelle et de l'apprentissage au conseil régional de Bretagne. "La rentrée a cumulé la crise, le facteur majeur de la baisse des contrats d'apprentissage, et cette réforme du bac professionnel, détaille encore Laurent Lacour. On avait annoncé au ministre que ça allait être compliqué avec ces deux facteurs."

Pour favoriser le développement du contrat d'apprentissage, l'Etat a multiplié les aides. Avec le premier plan jeunes, lancé en avril 2009 par Nicolas Sarkozy, les entreprises de moins de cinquante salariés qui embauchent un apprenti supplémentaire d'ici au 30 juin 2010 reçoivent une prime de 1.800 euros. De même, toute entreprise qui recrute un apprenti d'ici au 30 juin, bénéficieront du dispositif "zéro charge".

"Attention à ne pas transformer l'apprentissage en emploi aidé !"

Des mesures, comme la possibilité pour un apprenti d'entrer en centre de formation d'apprentis (CFA) sans employeur pour une durée limitée à deux mois, ont également été adoptées dans la nouvelle loi relative à la formation qui a été votée le 14 octobre. Mais si cette mesure peut développer l'apprentissage, elle n'est pas appréciée par tous, certaines régions notamment estiment que cela revient à faire de la formation initiale et non de l'alternance. Pour développer l'apprentissage, les régions mettent elles aussi en œuvre des aides diverses. La région Bretagne a accordé récemment une aide supplémentaire de 500 euros aux TPE, aux communes et établissements publics, faisant passer de 1.420 euros à 1.920 euros par an par apprenti la prime régionale. La région Languedoc-Roussillon offre depuis peu un chèque apprentissage aux entreprises, avec 1.800 euros d'aide supplémentaire pour la signature d'un contrat d'apprentissage, et une aide de 1.800 euros encore, pour l'embauche d'un apprenti en contrat à durée indéterminée. Des aides viennent s'ajouter à l'aide à la formation de 1.000 euros déjà prévue par la région. 6.600 euros donc en tout pour une seule et même entreprise, contre 5.500 l'année précédente... Des mesures nécessaires, d'après la région, pour limiter les dégâts. Les entrées en apprentissage dans la région n'ayant augmenté que de 1,88% en 2009 contre 6% en 2007 et 5,3% en 2008. Mais qu'en est-il du cumul de ces aides ? "Si un employeur arrive à cumuler toutes les aides, exonérations de charges, mesures du plan jeunes, aides régionales, il peut presque arriver à gagner plus que ça ne lui coûte, détaille Laurent Lacour. Il faut faire attention à ne pas transformer les contrats d'apprentissage en emploi aidé !" Et le risque de concurrence entre les différents contrats en alternance est également là. "C'est le problème des vases communicants", explique le responsable de la région Limousin. Il existe toutefois un secteur où l'apprentissage est sous-exploité. Il s'agit de la fonction publique. D'après le rapport de Jean-Claude Carles, la fonction publique ne comptait que 6.000 apprentis en 2007 alors que le secteur privé en avait recruté 280.000 ! En 2008, 6.400 apprentis seulement ont été accueillis. Un fort potentiel mais qui est entravé par de nombreux freins. La question du financement est l'un des plus gros problèmes. Les collectivités ne payant pas de taxe d'apprentissage, qui doit supporter la charge ? Autre souci : le recrutement, qui se fait le plus souvent par concours. La loi sur la formation a levé certains freins, comme la suppression de l'agrément préfectoral préalable exigé pour les employeurs publics qui veulent accueillir des apprentis. Et dernièrement, le rapport de Laurent Hénart sur le sujet, a proposé un système de bonus-malus pour inciter les administrations à accueillir au moins 1% de jeunes en apprentissage parmi leurs effectifs. Reste à savoir si toutes ces mesures, associées aux nouvelles règles du jeu imposées par loi sur la formation, suffiront à inciter durablement les employeurs. Car c'est avant tout le besoin de main-d'oeuvre qui dictera leur choix.

Emilie Zapalski

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