la Croix-Rouge plaide pour une meilleure prparation linvitable

May 2024 · 6 minute read


Alors que les catastrophes climatiques "inévitables" mettent chaque jour un peu plus la population française "sous pression", cette dernière reste insuffisamment préparée à y faire face, met en relief la Croix-Rouge dans une nouvelle édition de son rapport sur la résilience de la société française face aux conséquences du changement climatique présentée ce 25 avril. L’association pointe notamment une "vraie méconnaissance des actions les plus basiques pour réagir en cas de catastrophe, avec plus de 9 Français sur 10 qui n’ont pas à leur domicile un sac d’urgence déjà prêt en cas d’évacuation". Elle déplore encore que "seuls 37% des Français ont le bon réflexe" en cas de catastrophe, "en se mettant en sécurité et en écoutant les informations", ou que seuls 40% auraient récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent – un taux "parmi les plus bas en Europe", qui fait pâle figure face aux 95% en Norvège ou 80% en Allemagne. Un taux par ailleurs d’autant plus inquiétant que, souligne le rapport, "depuis près de dix ans, le délai moyen d’intervention des secours augmente régulièrement".

La préoccupation environnementale victime de la concurrence

Si "le sentiment d’exposition aux risques climatiques et l’inquiétude qu’ils induisent ne cessent de croître", "le sentiment de préparation augmente moins vite que le sentiment d’exposition", regrette la Croix-Rouge. Un sentiment d’exposition dont il a par ailleurs été récemment souligné qu’il reste encore très sensible à l’actualité (voir notre article du 21 février). Ce que concède d’ailleurs le présent rapport. L’association constate en effet que si la "dégradation de l’environnement" constitue une inquiétude croissante, elle "ne parvient qu’à la 4e place des préoccupations des Français", très loin derrière "la violence et l’insécurité" d’une part et "l’immigration" d’autre part, et juste derrière "la pauvreté en France". En matière de sujets d’inquiétude, la concurrence est rude. "Les crises non climatiques se succèdent (Covid, tensions internationales, inflation…) depuis trois ans et éloignent les potentiels effets dévastateurs résultant de la crise climatique de l’esprit des Français", note le rapport. 

Du mieux pour l’avant…

Motif de satisfaction, "les pouvoirs publics ont progressé sur le volet planification". Le rapport se félicite ainsi que "le nombre de communes devant se doter d’un plan communal de sauvegarde a doublé", du fait de la loi Matras (voir notre article du 22 juin 2022 et celui du 12 décembre 2022). Petit bémol : "Aujourd’hui, seule la moitié des communes s’est déjà organisée dans ce sens", même s’il est relevé que "ce chiffre ne cesse d’augmenter". Pour les communes très rurales, l’exercice ne reste guère aisé, comme cela a été récemment relevé (voir notre article du 6 octobre 2023). Autres points positifs relevés, le doublement – de 3 à 6 – du nombre d’observatoires régionaux du changement climatique entre 2020 et 2021 d’une part, et celui du nombre de projets territoriaux d’adaptation au changement climatique fondés sur la nature – de 14 à 28, entre 2018 et 2020 cette fois – d’autre part. Ou encore une meilleure identification des risques, notamment via le portail Drias, les futurs du climat.

… mais des progrès nécessaires pour "le pendant"

Pour autant, la Croix-Rouge estime que "la réponse en urgence à la crise a malheureusement tendance à ne pas prendre suffisamment en compte les besoins réels des populations". Elle déplore singulièrement une coordination défaillante entre l’État, les collectivités et les associations, plaidant pour qu’elle aille "jusqu’au dernier km, celui du citoyen". L’association préconise en conséquence la "désignation d’un coordonnateur national chargé de préparer l’ensemble des acteurs à mieux gérer les crises", proposition dont elle rappelle qu’elle a déjà été portée par le rapport Courant (voir notre article du 12 juillet 2021). Ou pour systématiser l’organisation d’une journée nationale d’exercice et de préparation aux crises associant tous les acteurs concernés (État, collectivités, associations, population…), qui se tiendrait lors de la journée "Tous résilients face aux risques", prévue le 13 octobre (voir notre article du 9 février).

L’association recommande par ailleurs la création d’un "cadre juridique plus incitatif pour les employeurs" afin de favoriser la mise à disposition de leurs salariés pour qu’ils puissent effectuer une mission opérationnelle de sécurité civile – sur le modèle de ce qu’a prévu la loi Matras pour les sapeurs-pompiers volontaires (voir notre article du 26 novembre 2021) –, et permettre plus largement la constitution d’un corps de volontaires prêts à être déployés lors d’une crise.

Elle préconise également de mailler le territoire avec des plateformes centralisant des stocks de matériel et des moyens logistiques prêts à être déployés localement. Plateformes qui pourraient également servir de lieu de formation, de sensibilisation et de coopération.

… en particulier pour les plus vulnérables…

Considérant encore que les catastrophes climatiques constituent un "accélérateur de vulnérabilité", l’association plaide pour l’instauration d’un "plan grand chaud", à l’instar du plan "grand froid", pour protéger les plus vulnérables pendant les épisodes de canicule. Afin de garantir l’accès à l’eau et à l’hygiène, les collectivités sont invitées dans ce cadre à proposer des fontaines publiques gratuites et des bains municipaux. En outre, les futures constructions de lieux accueillant les publics vulnérables devront être adaptées aux risques climatiques.

Par ailleurs, la Croix-Rouge souligne que le dispositif FR-Alert (voir notre article du 10 juin 2022) est susceptible de laisser certaines catégories de population – "personnes âgées, non diplômées, les ruraux…" – à l’écart des informations en temps réel relatives aux consignes de sécurité. Aussi, pour mieux repérer ces personnes vulnérables en amont, elle propose d’améliorer le cadre des registres communaux des personnes vulnérables et de "réactiver les comités départementaux de veille sociale", qui permettraient de "recenser tous les lieux protégés sur le territoire pouvant accueillir des personnes vulnérables et de diffuser des informations sur l’accès aux biens essentiels, à l’eau et à l’hygiène". Elle recommande encore d’identifier un opérateur par département au sein des stratégies territoriales pour intervenir – en lien aves les Sdis, l’ARS et autres acteurs compétents – sur la réduction des risques dans les lieux de vie "informels" (bidonvilles, campements…). 

… et pour "l’après"

La Croix-Rouge souligne enfin la nécessité de mieux appréhender "l’après catastrophe", en mettant notamment en exergue les conséquences psychologiques induites par ces dernières : stress post-traumatique chez les sinistrés ou état d’anxiété persistant, comme le phénomène de "pluvio-anxiété" récemment mis en relief suite aux inondations dans le Pas-de-Calais (voir notre article du 29 février). Elle propose ainsi de former les volontaires au soutien psychologique immédiat sur les lieux de catastrophe, en sus de la mise en place de lignes téléphoniques dédiées et de centres de soutien.

Un rapport qui va nourrir le PNACC

Le ministère de la Transition écologique, auquel l’association a remis son rapport la semaine passée, a d’ores et déjà fait part de sa volonté de "travailler" certaines recommandations de la Croix-Rouge afin de les intégrer dans le nouveau plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC). Parmi elles, celle visant à la constitution d’un corps de volontaires : "On va essayer de l’articuler avec le service civique écologique récemment lancé par le ministre Christophe Béchu" (voir notre article du 8 avril), indique-t-on dans l’entourage de ce dernier. Le ministère précise que d’autres sont déjà présentes dans ce PNACC en cours de finalisation, comme celles visant à renforcer la sensibilisation des Français aux risques ou à mieux "cibler" les personnes vulnérables.

 

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