A Tourcoing, Move to Work dope l'emploi des jeunes (59)

August 2024 · 5 minute read

A Tourcoing (92.000 habitants), la question de la mobilité internationale est aujourd’hui naturelle, et une initiative réussie avait été lancée dès 2008 par une association de quartier de Tourcoing : en deux ans, 30 jeunes avaient pu bénéficier d’une expérience professionnelle à Londres. Le maire de Tourcoing, Michel-François Delannoy, est convaincu par cette opération : "J’ai vu ces jeunes avant leur départ, souvent peu confiants et repliés sur eux-mêmes et leur quartier, devenus des "Français à Londres", revenir plus mûrs et plus sûrs d’eux." Pour proposer de nouveaux chemins vers l’emploi à une jeunesse souvent résignée, l’élu demande aux acteurs locaux de l’emploi de trouver de nouvelles solutions en s’inspirant de cette première expérience associative.

De nombreux partenaires locaux mobilisés pour imaginer et financer le dispositif

En gardant à l’esprit l’expérience londonienne, la maison de l’emploi Lys-Tourcoing, pilote du projet cherche un modèle avec l’appui opérationnel de la mission locale de Tourcoing-Vallée de la Lys. Le projet est soutenu financièrement par la ville de Tourcoing, Pôle Emploi et les villes du syndicat intercommunal Lys-Nord Métropole. "En 2010, alors que nous étions en phase de réflexion, nous avons lu dans la presse locale que des entreprises régionales devaient se rendre à l’exposition universelle de Shanghaï, sans aucun jeune dans leur valise, se souvient Patrice Duthoit, directeur de la maison de l’emploi. Nous les avons contactées et les entreprises ont tout de suite accepté d’emmener six jeunes deux semaines en Chine." L’un de ces jeunes, un cuisinier qui ne trouvait pas d’emploi à Tourcoing a travaillé pendant quinze jours avec un chef étoilé à Shanghai. Dès son retour, il avait plusieurs propositions. Move to Work était né. Il fallait encore modéliser cette idée qui consiste à offrir une expérience professionnelle à l’étranger à des jeunes. En 2011, une autre expérience aux Etats-Unis fait partir les jeunes 4 mois pour suivre des cours à l’université et des stages dans des groupes internationaux. Puis d’autres destinations ont enrichi le programme. D’abord soutenu par Pôle Emploi, Lille Métropole, les villes de Tourcoing et de la Vallée de la Lys, le projet a emporté dès 2011 l’adhésion des services de la Direccte et l’appui décisif de la région. Grâce aux financements régionaux, une méthodologie est mise en place à partir des expériences de terrain. Elle est même déposée sous la marque Move to Work® pour favoriser son extension. L’ensemble des missions locales de la région sont labellisées. En 2013, le programme envoie désormais 200 jeunes demandeurs d’emploi à Londres, Tenerife, Berlin, Vancouver et aux Etats-Unis, Seattle et Fort Wayne. Le public des bénéficiaires s’est lui-même élargi passant du public des jeunes Tourquennois à ceux de Lille-Métropole en 2013.

Préparation à la mobilité et accompagnement des premières semaines, correspondants locaux

Pour partir, le candidat doit être âgé de 18 à 25 ans, demandeur d’emploi et de nationalité française. Move to Work repose sur trois piliers : une préparation à la mobilité très courte, la sécurisation des premières semaines sur place et l’immersion en entreprise. "Dans une logique de rapidité et d’accélération, il faut faire partir le jeune de 3 à 5 semaines après qu’il ait dit oui, quel que soit le niveau d’anglais ou de diplôme, explique le directeur de la maison de l’emploi. Tout le monde peut partir, mais un retard ou une absence injustifiée à une réunion empêche le jeune de participer, c’est un contrat !" A l’étranger, le dispositif accompagne le jeune pendant 3 semaines, logement, repas, déplacements sur place et téléphonie sont assurés, ainsi qu’un accès permanent à Internet. Des correspondants locaux se chargent en outre de la mise en relation rapide avec des entreprises du secteur de l’hôtellerie-restauration et des services (e-commerce, finance, administration). Au-delà des trois premières semaines, le jeune a un travail, il quitte le logement fourni et développe son autonomie. En moyenne, le séjour dure 2 mois et demi. "Il s’agit d’offrir une expérience réelle, un accès à l’autonomie à des jeunes au chômage», insiste le directeur. En 2011 et 2012, 80% des jeunes participants étaient en immersion professionnelle réussie dans les trois premières semaines de leur arrivée, et 70% des jeunes diplômés ayant participé au programme exerçaient un métier à leur niveau de compétence en France ou à l’étranger.

Pérenniser le système

"Un tel dispositif nécessite un portage institutionnel fort pour faire éclore les initiatives. Il repose également sur un ancrage local pour la détection de jeunes candidats, l’équilibre entre les territoires bénéficiaires pour ne pas avantager un quartier plus qu’un autre, conclut le maire. Aujourd’hui, nous avons le devoir d’être audacieux et d’inventer des solutions souples et réactives." "Le principal défi sera de trouver des financements, car Move to Work coûte en moyenne 2.000 euros en Europe et 5.000 euros hors Europe", précise le directeur de la maison de l’emploi, qui espère intégrer la programmation FSE (Fonds social européen) pour 2014-2020. "Le coût est très relatif, en réalité, ça coûte plus cher de mettre un jeune dans un emploi aidé", modère Michel-François Delannoy.

"Sortir de son environnement familier entraîne un effet de maturité comme le faisait le service militaire, souligne le maire de Tourcoing. Tout le monde est gagnant : nous aidons les jeunes dans leur projet et cette jeunesse éclairée par une expérience internationale vient ressourcer la ville".

Cécile Perrin pour la rubrique Expériences des sites www.mairieconseils.net et www.localtis.info
 

Les jeunes mettent en valeur leurs expériences via un blog en ligne
Move to Work intègre la formation des jeunes aux outils de valorisation numérique des compétences. Lors de leur expérience internationale, les jeunes sont invités à faire vivre un e-portfolio sur internet avec des textes, des photos et des vidéos qui sont accessibles aux recruteurs du Nord-Pas-de-Calais. "Outre leurs compétences linguistiques et leur expérience internationale, les bénéficiaires de Move to Work rentrent dans l'ère du recrutement numérique interactif et multimédia", se réjouit le directeur de la maison de l’emploi.

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